Sam Touzani est un véritable homme-orchestre : comédien, danseur-chorégraphe, auteur, metteur en scène. Homme de spectacle, mais aussi de cœur, de lettres et de parole. Un amoureux de la langue française qui jongle avec les mots, les idées, la vie. Entre le rire et la tendresse, entre la rage et la raison. Lucide, engagé, révolté, mais aussi profondément généreux, débordant d’optimisme et de confiance en l’humanité.
C’est son professeur de français, Mme Leconte qui lui fait découvrir le théâtre, à l’âge de 12 ans. Depuis il n’a plus jamais quitté la scène…
Dans ses spectacles, il passe au scalpel notre société, il se joue des paradoxes et il nous raconte des histoires qui donnent à repenser notre pensée.
Par le témoignage et l’humour, Sam Touzani emprunte la voie du partage et de la réconciliation, mais aussi celle de la critique et de la subversion tout en évitant les pièges de la victimisation et du repli communautaire.
Aujourd’hui, c’est un artiste reconnu comme un incontournable représentant de la culture de Belgique, c’est ainsi qu’il parraine depuis longtemps de nombreuses initiatives artistiques tout en étant impliqué dans le milieu de la citoyenneté active. C’est un Électron libre, un libre-penseur, un farouche défenseur des Droits Humains, un militant laïc et féministe…
Je pense donc je dis ?
La liberté d’expression, tout le monde est pour. Et pourtant… Pourtant, ces dernières années, de Salman Rushdie aux caricatures de Mahomet publiées par Charlie Hebdo, on n’en finit pas de la questionner. Peut-on tout dire ? Et dans quel but ? S’agit-il de choquer pour le plaisir de choquer, en s’attaquant ainsi à ce que d’aucuns considèrent comme sacré ? Ou des enjeux plus fondamentaux se cachent-ils derrière des productions artistiques en apparence futiles ? Pour aborder ces questions, en particulier avec des jeunes, parents et enseignants sont bien souvent démunis. Aussi les auteurs, le comédienSam Touzani et l’enseignante Nadia Geerts, ont-ils voulu aborder ces questions en s’adressant directement aux jeunes. Sans tabou, en langage clair, en partant de supports visuels suscitant le débat.
Roman d’un film à venir
Roman d’un film à venir
Rolland Westreich
Sam Touzani
Parution : 5 février 2015
ISBN : 978-2-343-03866-7
200 pages
www.editions-harmattan.fr
Il a presque 17 ans, son père le tance pour l’aider dans la boucherie, mais il vit pour créer des sculptures et mobiles. Il est amoureux de la jeune aide bouchère – mais n’ose pas lui dire. Et puis ses parents meurent… Le voilà avec la boucherie sur les bras. Et les sculptures dans la tête. Et la jeune fille dans son lit. Que faire de sa vie ? Il s’appelle Malek, elle Madeleine ; les parents, c’est Rosine et Radouane – pour ce que ça change… D’ailleurs, Westreich et Touzani, ont-ils écrit un roman, un scénario ou une forme hybride ?
2017
Liberté – Egalité – Identités !
Auteur : Sam Touzani – Bernard Breuse
Interprète : Sam Touzani
Mise en scène : Bernard Breuse – Sam Touzani
Lieu : Théâtre le Public – Théâtre de l’Eden – Centre culturel d’Uccle –
Vauxhall de Nivelles – Wolubilis – Festival Philosophia
2016
Les enfants de Dom Juan
Auteur : Sam Touzani – Gennaro Pitisci
Interprète : Sam Touzani – Ben Hamidou
Lieu : Maison des Cultures de Molenbeek
2015
C’est ici que le jour se lève
Auteur : Sam Touzani – Rolland Westreich
Interprète : Sam Touzani
Mise en scène – chorégraphie : Isabella Soupart
Lieu : Théâtre le Public – Festival Musiq3
2014
Les chaussures de Fadi
Auteur : Caroline Safarian
Mise en scène Caroline Safarian
Interprète : Ben Hamidou
Chorégraphie et collaboration artistique : Sam Touzani
Lieu : Espace Magh
Rwanda Mais avant et puis Après
Auteur : Souâd Belhaddad
Interprétation : Sam Touzani
Rôle : Said El mrabet
Mises en scène : Souâd Belhaddad
Lieu : Centre Culturel de Schaerbeek
Papier d’Arménie – Sans retour possible
Auteur : Caroline Safarian
Interprétation : Sam Touzani
Rôle : Azad Bergonian
Metteur en scène : Caroline Safarian
Lieu : Espace Magh
2012
Seul en scène : Peur de rien
Auteur : Richard Ruben, Arnaud Bourgis, Sam Touzani
Interprétation : Richard Ruben
Lieu : Centre culturel de Woluwé
Spectacle Musical « For the beauty of confusion »
Auteur : Geike Arnaert , Sam Touzani
Interprète : Geike Arnaert
Metteur en scène : Sam Touzani
Lieu : Botanique, Vooruit, Roma, Depot, Cactus Club
2010
A portée de crachat
Seul en scène
Auteur : Taher Najib
Interprétation : Sam Touzani
Mise en scène : Richard Kalisz
Lieu : Espace Senghor, Théâtre Jacques Franck, Le théâtre Le Manège (Caserne Fonck)
Seul en scène « Ruben refait le monde
Auteur : Richard ruben, Arnaud Bourgis, Sam Touzani
Interprétation : Richard Ruben
Lieu : Festival de Spa – Atelier Jean Vilar
2009
Mozaik
Seul en scène
Auteur : Dhalia Pessemiers et Sam Touzani
Interprétation : Dhalia Pessemiers
Mise en scène : Sam Touzani
Lieu : Zuideperhuis Anvers
Musique : Mirdin De Cauter et Thomas De Smet
2008
Liberté égalité sexualité
Seul en scène
Auteur : Bernard Breuse – Sam Touzani
Interprétation : Sam Touzani
Mise en scène : Ruud Gielens
Lieux : KVS théâtre, Théâtre de Namur, Volubilis Théâtre,
Avignon 2007, Amsterdam
2006
Le Rapport des enfants sur l’Etat du Monde
Auteur : Stanislav Cotton
Interprétation : Sam Touzani et 15 enfants
Mise en scène : Véronique Van Meerbeek
Assistée de Gabrielle Dailly
Lieu : Théâtre de la Balsamine – Bruxelles
2006
Allah Super Star
Seul en scène
Auteur Yassir Ben Miloud
Interprète : Sam Touzani
Rôle : Kamel Hassani
Mise en scène : Roland Mahauden – Assistant : Arnaud
Bourgis
Lieu : Théâtre de Poche – Bruxelles
2005
Contes Erotico-urbains
Auteur : Thomas Gunzig
Interprète : Riton Liebman
Mise en scène : Sam Touzani
Lieu : Théâtre de Poche
2004
Premières rencontres
Les discours du XXième Siècle
Mise en scène : Charlie Degotte et Sam Touzani
Lieu : Théâtre de Poche – Bruxelles
2003
Gembloux! A la recherche de l’armée oubliée
250 représentations
Auteur : Gennaro Pitisci, Nasser Nafti, Ben Hamidou, Sam
Touzani
Interprète : Ben Hamidou – Sam Touzani
Rôles : Mokhtar, le bourgmestre, le conteur.
Mise en scène : Gennaro Pitisci
Lieu : KVS-Bottelarij Théâtre, Parlement Bruxellois, Avignon
2002
One Human Show
Seul en scène
350 représentations
Auteur : Bernard Breuse et Sam Touzani
Interprète : Sam Touzani
Rôle : Sam, Kamel, Van Artevel, Nadia, Rachid.
Nominé aux Prix du Théâtre 2003, catégorie « Meilleur Seul
en Scène »
Primé au Festival International du Rire de Rochefort 2002
Mise en scène : Bernard Breuse
Lieux : Théâtre de Poche, Espace Delvaux, KVS Théâtre,
Botanique, théâtre Varia, Avignon 2004, Centre Wallonie – Bruxelles à Paris
Premières rencontres
Mise en scène : Tilly
Assistant mise en scène : Sam Touzani
Lieu : Théâtre de Poche
2000
La Revue Arabique
Mise en scène : Charlie Degotte
Interprète : Sam Touzani
Rôles : le psy, le reporter sportif, le jeune des banlieues, le flic
Lieu : Halles de Schaerbeek
1999
Le Mâle du siècle
Auteur : Richard Ruben et Sam Touzani
Mise en scène : Sam Touzani
Interprète : Richard Ruben
Lieux : Théâtres de la Main d’Or, Clavel et Trévise (Paris),
Théâtre Molière (Bxl) + tournée
1997
Dieudonné fait son Kabongo
de D. Kabongo
Mise en scène : Sam Touzani
Auteur : Dieudonné Kabongo et Sam Touzani
Lieu : Espace Delvaux – Bruxelles
1996
Maison brûle
par le Brocoli théâtre
Mise en scène: Gennaro Pitisci
Auteur – Ecriture collective
Interprète : Sam Touzani
Rôle : Nike
Prix : Coup de coeur de la presse
1994
Fruits défendus
par le Brocoli Théâtre
Mise en scène : Gennaro Pitisci
Auteur : Ecriture collective
Interprète : Sam Touzani
Rôle : Saïd
Lieu : Théâtre du grand Parquet + tournée
1989
Lauréat du concours de poésie
Un Auteur, Une Voix
RTBF
1987
L’étranger et Caligula
de Albert Camus
Mises en scène: Eric Thirion et Jean Luc Hautier
Interprète : Sam Touzani
Rôles : Meursault et Caligula
1985
La Leçon
de Eugène Ionesco
Mise en scène : Eric Thirion
Interprète : Sam Touzani
Rôle : Le professeur
Lieu : La ferme de Martin Roux
Prix : Lauréat du concours promotion théâtre
2016
Tamara « La revanche d’une ronde »
Réalisateur : Alexande Castagnetti
Rôle : Le père de Tamara
Genre : comédie
Nationalité : Française
2003
Vertige de la page blanche
Long Métrage
Réalisateur : Raoul Ruiz
Rôle : Pierre Marchand
Genre : Drame
Nationalité : Belge
1999
Deuxième quinzaine de juillet
de Christophe Reichstag
Rôle: M. Dehaan
Genre : comédie
Nationalité : Française
1997
Le Bal Masqué
de Julien Vrebos
Rôle: Nico
Grand prix du jury et meilleure réalisation
au Festival du Film de Gand
Genre : Drame
Nationalité : Belge
2009-2010
Chante
Série
Réalisation : France 2
Saison 2, 3 et 4
Rôle : Karim Brahi
2001
La Torpille
de Luc Boland
Rôle : Gus, le rappeur
2001
Le Piège d’Oléa
d’Alain Robak
Rôle : Le brancardier
1995
Tip Tap Show
de Pierre Barré
Téléfilm musical (RTBF/Télé2/TV5)
Rôles : le Professeur et Charlot
1994
La Veuve de l’architecte
de Philippe Monnier
Rôle : Pépo
1993
Ecole d’enfer
de Jacques Bourton
1er rôle : Mehdi
2005
Le Train
de Luc Descamps
Court-métrage
Rôle : Le passager
1996
Testament d’un macaque
de Jamel Mokni
1er rôle : Lakhdar
1995
La Visite
de Lilian Cornelis et Jean Baptiste Van Zeebroeck
2005
Le Train
de Luc Descamps
Rôle : Le passager
2015
La folle journée de Valentin
Lieu : Cirque Royal
Mise en scène : Sam Touzani
Chorégraphie : Joëlle Morane
Ecriture : Sam Touzani
Interprète : Ballet jeunesse
2014 Classimo Festival
Le carnaval des animaux de C. Saint-Saëns et Casse-noisette de Tchaikovsky
Lieu : Bozar de Bruxelles
Interprète : Sam Touzani
Musiciens ( Eliane Reyes et Johan Schmidt )
2014
ZIDANI FAIT SON CIRQUE !
Interpréte : Zidani
Mise en scène : Charlie Degote
Chorégraphe : Sam Touzani
Lieu : Cirque Royal
2013
A new Music Hall-Make a wish
Chorégraphe : Joelle Morane
Mise en scène : Sam Touzani
Interpréte : Le Ballet Jeunesse
Lieu : Cirque Royal
2008
Les Forains
de Henri Sauguet
L’Orchestre Philharmonique de Liège / Direction : Pascal Rophé
Interprète : Sam Touzani
Mise en scène : Sybille Wilson
Décors et costumes : Aline Breucker
Avec la collaboration de l’Ecole de Cirque de Bruxelles
Lieu : Palais des Beaux-arts de Bruxelles + Opéra de Liège
2008
Pierre et le loup de Prokofiev et Le Carnaval des animaux de
Camille Saint-Saens
Interpréte : Sam Touzani, Philippe
Musicien : Philippe Navarre et les professeurs de la Mozart
Académie
Lieu : Palais des Beaux-Arts (Bruxelles)
2002
Petite Misère
de Philippe Boon et Laurent Brandenbourger
Long métrage,
chorégraphies : Sam Touzani
1993-2001
DBS Professional Dance Company
Direction artistique, chorégraphie et mise en scène : Sam Touzani
1997-2000
Pour la Gloire (RTBF)
Chorégraphie et coaching artistique : Sam Touzani
1997-1999
Pierre et le Loup
de Prokofiev
Conte musical Interprétation, chorégraphie et mise en scène : Sam Touzani
Rôle : le narrateur
1995-1998
One Night in New York
Comédie musicale,
chorégraphie et mise en scène : Sam Touzani
Rôle : Sami, le travesti
1997
Fête
Comédie musicale
Lieu : Palais des Beaux Arts à Bruxelles
Rôle : Monsieur le directeur
Chorégraphie : Joëlle Morane
1996
Lauréat du Concours International de la Chanson
L’R du Temps
Grand prix du jury, prix de la Sabam, prix du public
Interprète : Sam Touzani
1994
Les Grands comédies musicales
Chorégraphie et mise en scène : Sam Touzani
Interpréte : Sam Touzani
Rôle : Amstan, le berbère
1993
Limelight
Lieu : Forest National/RTBF
Rôle : Charlie Chaplin
1993
Oliver Twist
Comédie musicale
Lieu : Forest National/TF1
Rôle : Fagin
1992
Un Américain à Paris
Comédie musicale
Lieu : Cirque Royal/RTBF/RTL
Rôle : Gene Kelly
1991
42nd Street
Comédie musicale
Lieu : Cirque Royal à Bruxelles
Rôle : Le Maître de cérémonie
1989
Tony et Vagabond
Comédie musicale pour enfants
Lieu : Vauxhall à Mons
Mise en scène
1985-1989
Kamikaze Force
Hip-Hop, Break-Dance, tournée européenne
Champion d’Europe en 1989
Chorégraphie : Sam Touzani
Interview réalisée en décembre 2017 pour la brochure de l’Espace Magh (janvier – juillet 2017)
Qui est Sam Touzani ?
Je suis d’abord un citoyen du monde et puis, un artiste polyvalent. J’ai eu la chance de faire à la fois de la danse, du théâtre, de l’écriture, de la chorégraphie, de la mise en scène et de jongler avec ces disciplines depuis longtemps. Je ne serai jamais spécialiste dans un domaine en particulier mais je commence à me spécialiser dans la polyvalence. (Rires)
Être artiste permet de mieux se connaître soi-même, d’appréhender plus en profondeur les personnes qui nous entourent et, surtout, les rapports entre les gens.
Tu es un véritable homme-orchestre : comédien, danseur, chorégraphe, auteur, metteur en scène, etc. En quoi ces différentes formes d’expression influencent ton art ou ta pratique de l’art ?
Non seulement elles l’influencent mais elles l’enrichissent. Je pars d’un constat très simple : il faut commencer par parler de ce que l’on connaît. C’est pour ça que je parle d’histoires que j’ai connues ou que j’ai vécues.
Même si il y a des textes contemporains, il y a une contemporanéité particulière et singulière à Bruxelles que je ne trouve nulle part ailleurs. Bruxelles est un projet de société qui me semble intéressant avec ses 180 nationalités, ses belles choses, ses discordes, ses incompréhensions, ses paradoxes, et parfois de la violence.
Je suis un amoureux des mots, j’aime bien les partager et les faire raisonner. Je raconte une histoire avec un début et une fin, en tentant de faire évoluer des personnages. Ensuite, je fais appel à des émotions. Enfin, si je peux donner un peu de matière à réflexion, tant mieux.
Lorsque tu écris, tu ne peux pas vérifier la résonance de ce que tu dis. Mais quand tu es comédien, tu sais déjà la manière dont tu vas le projeter. C’est un avantage énorme.
Le corps est très important et il est souvent laissé de côté. Tu commences à avoir une maîtrise de tous les langages. On ne réfléchit pas qu’avec sa tête mais avec tout son corps.
Cette interdisciplinarité me permet chaque fois de questionner l’autre. J’ai besoin de ça !
Dans ton parcours, la notion de liberté d’expression semble primordiale. En tant qu’artiste cela paraît incontestable de défendre cette idée. Ce combat est-il si évident ?
Non, je ne crois pas. Pour ma part, ce combat est lié à un contexte familial particulier.
Je suis issu d’une famille d’opposants politiques marocains. Ma mère et ma sœur ont vécu un drame en 1972. Monsieur Mohamed El Baroudi est venu à la rescousse et il est devenu un référent positif, l’intellectuel par excellence, celui qui a augmenté la conscience de toute la famille. J’ai été éduqué par ma mère et mes sœurs et elles subissaient de manière assez violente le manque de liberté d’expression au sein des communautés dites “arabo-musulmanes”. Très tôt, j’ai apporté mon soutien aux minorités sexuelles et aux minorités ethniques. C’est ce qui m’a constitué physiquement, intellectuellement, humainement et culturellement.
La liberté d’expression est un besoin essentiel pour moi. Je suis profondément attaché à cette liberté, je lutte contre toutes les idéologies mortifères notamment l’antisémitisme, l’islamisme, etc.
Au-delà de la liberté d’expression, il y a la liberté individuelle. Je ne sais pas ce qu’est la liberté mais je sais intimement, au plus profond de moi-même, ce que sont les libérations. Ces petites libérations qui te permettent de tenir debout et d’avancer. Au quotidien, tu gagnes sur toi-même : développer une estime de soi, se construire, ne pas être dans le déni, avoir confiance, prendre l’enfant blessé qui est en toi et le mettre contre ta poitrine et dire que ce n’est pas si grave que ça. Chez moi, la résilience a fonctionné.
Le spectacle Les enfants de Dom Juan sera présenté à l’Espace Magh du 25/4 au 5/5/2018. Comment est né ce projet ?
J’ai commencé l’écriture de cette pièce avec Gennaro Pitisci, Ben Hamidou et Nacer Nafti en 2005. Ben Amidou est un ami d’enfance. On s’est connu à Molenbeek quand on avait 15 ans. Avec Gennaro, je partage des valeurs et une vision du monde. On s’est vu à quatre pendant un an et demi et on a écrit des centaines de pages. Assez rapidement, Gennaro et moi étions en désaccord avec Nacer et Ben. Cela m’a beaucoup affecté et je l’ai vécu comme un échec total parce que je travaillais avec des gens que j’aimais. Ce n’était pas comme dans un casting où tu peux te dire que ce n’est pas grave si je tu n’as pas le rôle. C’était un projet important pour tout le monde. Ils sont allés faire leur expérience et en 2013, ils sont revenus tous les deux, presque 10 ans après. J’ai dit que je voulais bien réaliser le projet à condition de travailler, d’écrire le texte et de réaliser la dramaturgie avec Gennaro. Ce spectacle est un projet commun mais c’est un travail d’écriture et de dramaturgie réalisés à deux.
Avec Les enfants de Dom Juan, nous avons une double réussite. La première c’est que nous sommes arrivés à faire une comédie à deux personnages. Ce qui est très difficile parce qu’il faut habituellement une tierce personne pour révéler le conflit et “le comique de situation”. La deuxième, c’est que nous sommes arrivés, à travers une histoire très fraternelle, à une véritable transformation et une profonde remise en question de nous deux protagonistes. Une intrigue très simple et non simpliste avec en filigrane un choc des idées et non des civilisations, tout en y incluant les thématiques importantes qui nous préoccupent : l’exclusion, l’homosexualité, la laïcité, l’Islam, le rapport hommes-femmes.
C’est un spectacle universel, ou plutôt « universalisable » destiné à tout le monde. Cette pièce prône la force de l’échange et non celle de la violence. Finalement c’est notre réponse aux attentats.
L’humour amène-t-il plus facilement à la réflexion ?
Oui et non. Si l’humour pouvait ne pas être aussi idéologiquement despotique ou mortifère, il n’y aurait pas d’hommes comme Soral et Dieudonné qui sont les antithèses de ce qu’on essaie de faire et pourtant, ils font rire. Pour moi, l’humour est un magnifique moyen de lutter contre la bêtise humaine. Malheureusement, cela ne suffit pas. C’est une question d’équilibre, il faut doser les ingrédients car l’art humoristique peut-être aussi de la nitroglycérine, un des objectifs si cher à mon cœur, c’est de distiller des formes d’humour à travers une dramaturgie qui va nous permettre nous rappeler que le respect, c’est celui des femmes et des hommes et non des idées.
Étant l’un des membres fondateurs de l’Espace Magh, comment considères-tu une telle structure ?
J’ai un peu de recul aujourd’hui pour faire plusieurs bilans. Avec les membres fondateurs de la structure, nous nous sommes battus pour que ce ne soit pas un centre communautaire.
Je voudrais revenir sur une phrase de Mohamed El Baroudi qui dit “Je préfère à la diversité, l’égalité”. Si tu veux me parler de ta différence, il faut d’abord que je sois ton égal. L’Espace Magh ne revendique pas des particularismes effrénés. Il prône une diversité. À force de revendiquer des particularismes effrénés ça remet en cause le principe d’égalité. Et donc il y a danger. Avec les années, l’Espace Magh a fait un travail énorme pour accueillir et désengorger toute une série de personnes qui n’aurait jamais eu l’occasion de monter sur scène, d’écrire, de jouer, de chanter, d’être filmés, de partager une expérience humaine et culturelle. Et donc ça va au-delà de mes espérances.
Je pense que ce qui fait un peu défaut c’est que ce n’est pas un centre de création. J’aurais voulu que ce soit le centre névralgique des créations subversives et pertinentes. Nous avons quitté le stade où les minorités, même si elles sont belges mais d’origines immigrées, ont pu trouver une plateforme pour pouvoir s’exprimer. Je pense que nous devons continuer à viser l’excellence dans la création avec des spectacles avant-gardistes venant de tous les horizons culturels. Il faut travailler avec la réalité de sa cité, avec les gens qui font respirer la ville. Et ça se fait aussi avec des moyens et des visionnaires. Dans le contexte actuel, il faut respecter des critères car c’est un sentier subventionné. Il y a un cadre avec des contrats-programmes et des conditions qu’il faut remplir. Aujourd’hui, j’axerais la programmation de l’Espace Magh sur des créations originales qui ne seraient pas réalisées que par des artistes en Belgique mais avec des artistes qui viennent de l’étranger pour des artistes bruxellois. Cela permettrait une vision plus ouverte sur ce qu’il se passe ailleurs dans les autres villes européennes à Glasgow, à Londres, à Berlin. Aller chercher l’audace, l’insolite, l’avant-gardisme. Créer la tendance et ne pas la suivre. Je rêve un peu mais j’aimerais développer cela. Mais c’est déjà super ce qu’il se fait à l’Espace Magh quand je me souviens par où nous sommes passés et quand je vois le résultat, le nombre de spectateurs, le programme, etc. Espace Magh est un beau projet culturel et citoyen. Il y a dans la fonction et dans ses objectifs quelque chose de plus métissé qui me plait. C’est une notion en laquelle je crois. Si les gens ne se mélangent pas physiquement et également dans les idées, on évolue très peu.